Et revoilà Mahamadou Issoufou à Ouagadougou ! Le médiateur de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour le Burkina a été tiré de ses vacances. Lui qui pensait sans doute en avoir fini avec une bonne partie de sa mission depuis l’accord de juillet dernier, a de nouveau été rappelé pour prendre le pouls du patient Burkina Faso. Mais dans quelles conditions ?
Une reprise de service consécutive au coup d’État du Capitaine Ibrahim Traoré, qui a évincé le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba. Mais cette venue de la délégation de la CEDEAO qui a rencontré le nouvel homme fort du pays n’était pas du goût de tout le monde notamment les mêmes pro-russes qui sont contre la politique française.
En prélude à cette visite le 4 octobre dernier, des manifestants ont pris d’assaut certaines artères de la Capitale pour s’opposer à la rencontre et dire non à l’ingérence de l’institution sous régionale dans les affaires internes du Burkina. Une situation qui a obligé le nouveau Chef de l’État à lacer un appel pour inviter les manifestants à « libérer les voies publiques et à s’abstenir de porter atteinte à tout bien public ou privé ».
Mais cette foule qui n’écoute qu’elle-même n’en a cure. Beaucoup, malgré la demande de leur champion, n’ont pas levé l’ancre ni les barricades. Tout se passait comme si le « monstre » qu’IB a contribué à créer à travers son appel à la mobilisation aux temps chauds du putsch échappait à son contrôle. Et les hôtes à leur atterrissage ont été finalement reçus presque à huis clos.
La tenue dans laquelle est apparue le tombeur de Damiba n’aura, en effet, échappé à personne. Sécurité rapprochée impressionnante, treillis, mains gantées et cagoule militaire qu’il n’a pas ôtée, le Capitaine d’artillerie, jusque dans les moindres détails, avait l’air d’Assimi Goïta, le Président Malien.
Il ne manquait plus que la kalachnikov et le gilet pour qu’on l’eût cru en plein combat. Il aurait voulu montrer sa détermination et sa fermeté face à la CEDEAO qu’il ne s’y serait pas pris autrement. Mais ce n’est certainement pas un vieux routier comme Mahamadou Issoufou qui en serait intimidé dans son habituel boubou blanc immaculé.
D’ailleurs, à quoi servirait un énième bras de fer ? Avec ses relations tendues avec le Mali et la Guinée, la CEDEAO a tout intérêt à ne pas ouvrir un autre front avec le Burkina ; surtout que dans ses premières déclarations, son nouvel interlocuteur s’est montré dans de bonnes dispositions. Le calendrier prévoyant un retour à l’ordre constitutionnel normal en 2024 est même large, a-t-il estimé.
Une bonne disposition d’esprit confirmée par le médiateur qui, au sortir de l’audience, a assuré repartir satisfait et confiant. En attendant de voir la nouvelle architecture institutionnelle avec l’adoption de la Charte de la transition, l’on peut donc dire que le tango entre la CEDEAO et le Burkina se poursuit sous la douce mélodie de l’entente cordiale. Tant mieux pour les deux parties !
Alpha MOUMOUNI